Edit — Réplique

Le présent objet n’a pas vraiment vocation à synthétiser les 7 derniers mois de production, d’études et de réflexions transversales vécu au sein des quatre murs ravalé à la va-vite de l’ERG, Bruxelles. Il n’en a pas la vocation, et il n’en aura pas l’occasion. Cette publication est le fruit d’une commande, ou soyons précis, d’une très forte incitation scolaire à produire un ouvrage propre sur son propre travail, ce à partir d’une maquette impersonnelle et imposée.

Réplique à toutefois le mérite, de faire figure de jalon dans le travail de construction d’une philosophie et d’une éthique de création. À quoi bon, feindre un hypothétique questionnement aux applications universelles, sur la «situation du champ de création graphique» ? Non, nous laisserons ces moribondes questions aux théoriciens, tacticiens et autre impuissant. Les enjeux qui s’énoncent ici, n’ont pas la prétention de s’incarner ailleurs que dans une pratique personnelle. La mienne, celle de l’auteur, démiurge arrogant, avare de subjectivité frontale.

Voici sans doute, l’aporie de ma pratique. Les travaux qui seront présentés dans les prochaine pages, le design graphique, le graphisme ou communication visuelle, quelques soit les termes sur lequels nous ne saurions s’accorder, ne represente qu’une part infime d’un ensemble. Tous ces termes, s’accordent sur la fragilité de la réalité à laquelle ils renvoient. Aussi, il parait salutaire de renier toute inscription dans un domaine pré-établis pour l’ouvrir plus largement à une philosophie. Alors une première question apparaît ici. Comment opérer la transition, de l’intégration d’une pratique, qui jusqu’ici n’a trouver sont seul cirque d’épanouissement qu’entre les rassurantes colonnes du cadre scolaire, vers les terres rocailleuse des réalités économiques. Bien sûr, avancer cette proposition dans un projet initié dans le creux chaleureux d’un atelier graphisme à l’Erg, revêt l’écho des pétarades d’un cuirassé suisse, lancé du fond de la Volga. Bien sûr, les cinq travaux présentés ont trait de prés ou de loin avec le design, mais le plus intéressant n’est pas là…

La beauté, si tentée qu’elle soit, n’est pas à chercher dans la maestria des formes et des couleurs. Réplique, se démarque dans sa forme éditoriale par une absence totale de couleur. Noir ou l’ épineux vestige d’une austérité de caractère latente et encore bien mal camouflé. La beauté est à découvrir dans toutes ces onces, ces soupçons d’existence et de vie, de présent contrarié et de fantasmagorie cycliste sur semoule. La Superbe revendiqué ici est essentielle mais invisible. Elle saura se donner à celui qui sait avec patience promener son regard et ses mains sur l’objet de notre discussion.

Ni Éternité, ni perfection

Chaque travail abordé est pensé comme témoin d’un instant particulier. Il m’est, en effet, peu habituel de reprendre, peaufiner un projet. Préférence est donnée à l’abrupte enveloppe, formé et malformé en son temps, pour que vive entre crevasse et aporie, le sillage du vécu. Trace de l’Etre, défigurant de sa vulgaire matière, les idylliques mirages de pixels et papiers glacés. L’aspect demeure marqué par les cicatrices, les déboires et autres changements de cap, où la perfection formelle comme Idéal des temps absolue n’est pas à l’ordre du jour. Subsiste un chancelant non-finito, garant d’une intensité passé, seul vraisemblance présente acceptable à mes yeux. Aussi, on comprend l’avantage de ce refus catégorique de toutes réouvertures des affaires classées si ce n’est pour lui insuffler un souffle profond de changement : Éviter de ressasser. C’est donc par refus de l’immobilité et de l’ennui, qu’est revendiqué une abrasivité formelle.

Noire, l’austérité apparaît comme un de ces garde-fou à tout inextricable affaissement dans les limbes de l’esthétisme. L’austérité, sans parer une idée de sucre d’argent, devient outils afin de la structurer. Dans un paradigme stochastique, la dimension binaire de la trame, devient un paramètre suffisamment simple pour être possiblement maitrisé, porté au firmament du mont des rugosités et transcender la nature peccamineuse du travail. Chateau de cartes aux vents des alizées, que cette stratégie iconoclaste et radicale prétendant agripper un idéal, sensible et ressentit, qui si elle refuse l’ordre des illusions n’en demeure pas moins éphémère.

L’urgence des moyens graphiques convoqués, la rugosité de leur emploie ainsi que l’appel à des référents décloisonné, permettent à ce corpus d’investir des contrés transversales au seuls domaines graphiques du moins dans sa finalité formel.

En somme, une grande partie du travail présenté ici, s’établit suivant un schéma lui aussi binaire. La première étape revient à confronter un propos idéalisé, théorique à ses différentes mises en matière possible. Confrontation nourrissant un processus de pertes, fracas et emultion, entre réalité technique et caprice déchu. C’est alors qu’entre en jeu la seconde étape, sensiblement similaire puisque, nourrie des conséquences de la première. Elle tends par un processus de réflexion et de distanciation à en tirer leçon et matière de travail. Si ce processus de construction itératif peut prendre essor sur un projet en particulier, il peut de même être utile pour établir un lien de cohérence entre l’ensemble des projets évoqués. Chaque projet nourrissant celui à venir, l’acte de construction s’établissant une plus longue échéance que celui du court temps alloué à chaque projet.

De cet interminable processus en chiasme, l’acte de distanciation est un élément de convergence. On le retrouvera à dose inégale dans l’ensemble du corpus. Celui-ci se traduit tant au moyen de la Conceptualisation, d’un intérêt la matérialisation de l’objet, que de par la frivolité avec laquelle le designer aborde chaque projet.

Frivolité, cela pourrait paraitre absurde que de se revendiquer de cette légèreté de l’être. Cette position est toutefois un contre-point radical dans un contexte tant graphique qu’économique où la nécessité d’une illusoire profondeur, aider par les mots et le verbiage, se fait souvent au dépens de la pensée. Cette légèreté d’entreprise, se revendique donc à contre-courant de tout les charlatans et autres poudreur de Perlimpinpin, rentable pourfendeur du néant de l’intellect au profit des apparences et des charlatans eux même. Légèreté par refus du mythe d’un designer dévoué corps et âme à sa tache productiviste. Blafard et névrotique, végétant dans une fatigue et un dolorisme permanent. Ultime sacrifice zélé dévoué au bien des sociétés. La passion justiferai tout. Légèreté encore par refus d’un attachement à l’objet. Si sa mise en matière est essentielle, elle n’en demeure pas moins contingente et toute iconisation de l’objet.

Tête de Cochon

Si la majorité des projets qui seront présentés ont été concocté dans un cadre scolaire, aucun n’est assumé comme tel. Exit une explicite formulation de la demande, des attentes. C’est sans doute moins par plaisir de dire non, que par besoin de constamment sonder les limites qui cernent chaque travail, de définir la frontière entre les eaux claires et troubles. Deversant par arogance et audace les noirs reflux des torrent que depuis cinq ans je cultive, j’aime me souvenir des frêles clivages d’hier, aujourd’hui grisé par l’oubli. En ce sens Copie est un aimable pied de nez vis-à-vis de la création d’un ouvrage qui sur le fond à tout d’un cri du cœur, mais dont l’envol restera, par sa forme imposée, cloué au pilori des âmes doubles, sur le pathétique autel des faux-semblants. Réplique ne s’aurait en rester là…

Mais de verbiage et d’expression égoïste, il suffit. Réplique parle de l’auteur à la troisième personne. Blanc est orgueilleux, irrévérencieux et je dois le dire assez impoli. L’heure des Bilan ? Il n’y en aura pas. Seul subsistera des questions nouvelles pour l’avenir.

B.


Domaine. Il est curieux de noter cet expressement des pionniers quel qu’ils soient, à delimiter tout azimuts, leurs domaines, leurs champs des possibles.