Dérives — Réplique

Il y aurait tant à dire, tant à discerner du point de départ de ce projet. Une photo ; disons une photographie pour mieux investir le théâtre technique de l’époque qui se distingue tant par la profondeur de ses noirs que par le lointain référent auquel elle renvoie. Cette architecture de Pierre et de Métal témoigne d’un temps révolu. Celui où le chant des possibles était encore faussé par le poids des traditions.Colisée d’acier sur poutrelle d’argiles. Jusqu’ici, la structure architecturale américaine n’arrivait pas encore à se défaire deson héritage classique. Elle cultivait une ambiguïté salvatrice, entre rationalité sibérienne et un ornementalisme dionysiaque.

Entre deux en point de départ

C’est précisément le dialogue de ces deux institutions, de ces deux idéologies, qui nous intéresse ici. Cette monstrueuse hybridité a sans doute était bien trop souvent calomniée. Dernier soubresaut d’angoisse face à tout ce qui remémore à l’Homme sa pittoresque démesure incarnée dans un style pompier. Pourtant, l’aporie de ces hôtels de l’austère décadence, instants latents d’entre-deux fourvoiement n’est pas à dynamiter. Au contraire, dans notre course entre Mode et éternité, c’est cette humaine indécision qui est à considérer, non comme faiblesse mais comme délicate apogé aux firmaments de deux gouffre de radicalité.

Matière frivole

La pierre fondue, l’acier taillé sont ici les imposants témoins de la légèreté humaine,de sa frivolité. Dans cette once d’absurdité, dans cet essentiel moment de non-sens,s’ouvre la possibilité d’une exégèse de l’acte de création.

Il y a ici alors, d’une part une affirmation de la fragilité humaine, de son intrinséque dépendance au corps par lequel elle l’exprime. Sous cette chancelante lumière , nous pouvons affirmer l’impossible dogmativité absolue de toute acte de création. En claire, Penn Station, car elle est le témoin incarné de deux époques, de deux paradygmes où ont convergé, outre moult querelle de cloché et variation sur le même thème, les désirs intellectualisés et la naiveté passionnée de générations d’Hommes. A quoi bon s’engager corps et âmes dans une radicalité éphémère, alors qu’il y a paradoxalement tant de vie, tant d’éternité dans la chancelante mise en matière de l’indéfini.

Néant, mémoire d’outre-tombre.

Revenons à notre point de départ. La technique au Bromure d’agent et gélatine sur plaque, que ce tirage convoque, impregne d’une silencieuse douceur le lourd horizon qui est décrit ici. Passons assez promptement sur le désagrément qualitatif de la technique photographique ; la longue exposition nécessaire, qui détermine une esthétique sans vie ; pour orienter notre analyse sur les grands boulevards pompeux de l’égoïsme. Qu’est-ce que ce lieu indique sur le graphisme de l’auteur ? Qu’est-ce que ce choix, apparemment parangon de ses affinités, nous dis ?

Rien.

Ou plutôt, voyons en cette technique le meilleurs outils pour incarné en l’image le néant, l’absence de vie, de mouvement, ou même de circonvolution. Étrange paradoxe que cette photographie sans tumulte trouve essence dans l’antre des foules du poussièreux nouveau monde : Pennsylvation Station, gare ferroviaire au coeur de BigApple.

Au vue de la noirceur de forme et de propos, on ne peux s’empecher de tendre notre interpretation vers celle d’un idéal de création carbonisé par d’obscure raison. Mais antracite n’étant synonyme de dépression, notre dérives graphique se veut profondement créatrice. __